27.11.04

Un regal!

Mondovino, de Jonathan Nossiter

Jonathan Nossiter, l’anti-Michael Moore ? A travers l’exemple du vin, le réalisateur nous parle de la mondialisation et de ses (m)effets. Le burlesque des situations, l’impertinence du montage, la force de la mise en scène : a travers ces éléments, Nossiter nous distrait autant qu’il nous informe, et ce qu’il nous montre a de l’importance. Donnant la parole à tous, il nous montre un univers, celui du vin, dont les mécanismes pourrait s’appliquer à beaucoup d’autres, notamment le cinéma. Edifiant !

Tout simplement in-cro-yable!

The Incredibles, de Brad Bird

C’est un cliché, mais on ne se lasse pas de le répéter : la dernière production des studios Pixar est une réussite totale ! Les Indestructibles est un pur chef d’œuvre de divertissement, qui plaira aux néophytes et ravira les initiés. A travers une réalisation ambitieuse et soignée, le réalisateur parvient à rendre hommage à ses illustres prédécesseurs (les premiers James Bond, Star Wars, l’univers Marvel Comics), tout en y ajoutant sa propre critique d’une société contemporaine (en particulier américaine) où tout le monde veut devenir une star et ou les gens normaux n’ont rien d’exceptionnel…

Enfin, ce film consacre la maturité du film de super-héros, un genre en pleine explosion depuis plusieurs années. Après les films de super-héros à prendre au premier degré, Les Indestructibles nous offre un film de super-héros révisionniste, dont le propos est d’assumer l’héritage d’une mythologie déjà bien établie, tout en la critiquant dans ses fondements. Les Indestructibles se pose donc comme l’héritier filmique de tout une littérature critique des super-héros, initiée par l’indispensable Les Gardiens d’Alan Moore.


18.11.04

Le film le plus étrange de l'année...

Birth, de Jonathan Glazer
Nicole Kidman nous revient, après le très médiocre Stepford Wives, dans un film pour le moins étrange. Elle est en train de devenir, en termes de crédibilité, une sorte de George Clooney au feminin: malgré qques ratages, chacun des projets dans lesquels elle est impliquée semble mériter un coup d'oeil, et au final, ce n'est pas forcement que son charme qui nous encourage a aller voir ses films...
Birth est un film étrange, qui, pour parler d'un sujet universel comme le deuil, passe par un élément surnaturel, avec des acteurs troublants et une mise en scène très élégante. C'est presque difficile de se dire que Jonathan Glazer est un réalisateur issu du clip et de la pub! Et pourtant, c'est le réalisateur du clip Karma Police de Radiohead, de Virtual Insanity de Jamiroquai, ou encore (moins connu cui-la) The Universal de Blur. Et c'est aussi lui qui est responsable de l'extraordinaire pub Levi's "Odyssey", ou l'on voit un homme et une femme courir en défonçant des murs...
Birth, un film etrange et envoutant, qui fait de Jonathan Glazer un jeune realisateur a suivre!

6.11.04

Argh....

Alien Vs. Predator, de Paul W.S. Anderson
Eh oui, j'ai fini par aller voir ce film dont j'ai entendu tant de mal, un film tellement mauvais que ses distributeurs n'ont même pas cherché à le promouvoir: pas de distributions d'invitations pour une avant-première, affiche pourrave dans le métro parisien....rien ne donnait envie d'aller voir ce film, qui pourrait apparaître aux yeux du non-initié comme relevant de la plus pure stratégie marketing ("en alliant dans un seul film 2 figures mythiques de la SF, on va attirer deux fois plus de monde que s'il n'y en avait qu'une seule!!!")...

Dissipons cependant certaines préconceptions liées à ce film:
- le réalisateur: Paul W.S. Anderson (à ne pas confondre avec Paul Thomas Anderson, réalisateur génial de Boogie Nights) est sans aucun doute LE réalisateur le plus haï sur Internet. Pourquoi? Parce qu'il le genre de film qui intéresse les internautes/cinéphiles, qui vont s'informer sur des sites comme Aint-It-Cool News et CHUD.com. Anderson s'est spécialisé dans l'adaptation (ratée) de jeux vidéos en films: Mortal Kombat, Resident Evil, Alien Vs. Predator...Comme les sites de cinéma sur Internet sont quasiment toujours gérés par des geeks, fans absolus de comic books et de jeux vidéos, ils connaissent par coeur la filmo de M. Anderson! Ses films ont souvent été de modestes succès commerciaux (ce qui explique pourquoi il continue de pouvoir en faire) mais généralement des ratages artistiques (et je reste persuadé que même avec un concept comme "Alien vs. Predator", il y a moyen de faire un film de SF de bonne qualité. Ce n'est pas le matériau qui est défaillant, c'est son passage au grand écran!).

- le projet : malgré ce que l'on pourrait croire, l'idée de ce film ne remonte pas à hier, mais s'inscrit dans une mode des années '90 dans les domaines des comics et du jeu vidéo aux Etats-Unis, la mode du "crossover". Qu'est-ce que le crossover? Comme son nom l'indique, cette mode consistait à mélanger les univers de différentes BD, différents films, et permettre aux personnages de passer outre les limites de leur univers (to "cross over") pour en rejoindre un autre. Expression d'un post-modernisme débridé qui cherche à abolir les frontières des genres et des formes artistiques? Pour le gamin de 10 ans que j'étais à l'époque, tout cela n'avait pas vraiment de sens, de voir des comics Alien vs Predator, Batman Vs Predator, Robocop Vs Terminator, Batman: Aliens...Même Disney s'y est mis le temps d'un dessin animé, au nom très pertinent de Tale Spin (le mélange des "tales", des histoires quoi): on y retrouvait des personnages secondaires de l'univers animé de Disney, comme le pilote pélican de La bande à Picsou, et Baloo du Livre de la jungle dans le rôle de deux pilotes des Caraïbes (oui oui, pilotes, pas pirates) qui luttaient contre l'ignoble Don Karnage, qui était en fait Shere Khan! Bref, je m'égare....
Alien vs. Predator apparut dans les années '90 sous forme d'une série de BD, dont certaines étaient plutôt réussies, ayant trouvé des idées assez plausibles pour faire interagir ces deux célèbres créatures du cinéma de sciences-fiction des années '80. Alien vs Predator se transforma aussi en jeu vidéo, un Doom-like très populaire en son temps.
Tout ça pour dire que l'idée d'un Alien vs Predator ne date pas d'hier!

Eh bon, comme si souvent, le rêve du fanboy s'est transformé en cauchemar, à croire que la réussite éclatante de projets ambitieux comme Lord of the Rings (ce qui n'était pas gagné d'avance) soit contre-balancé par des échecs énormes, à la LXG ou Alien Vs. Predator...pas étonnant que Anderson soit autant haï sur Internet (yen a un autre dans ce cas, c'est Uwe Böll)...Je ne doute pas une seule seconde de la sincère dévotion de Paul W.S. Anderson à son projet, mais cet imbécile devrait avoir l'honnêteté de reconnaître qu'il n'a aucun talent de scénariste! Son histoire est bonne, elle n'est d'ailleurs pas entièrement de lui, mais ses dialogues sont affreux et le rythme de l'histoire à chier (en une demi-heure, il ne reste plus que 3 humains survivants, sur les 30 de départ. Remarque, on s'en fout un peu vu qu'ils sont cons et qu'ils parlent mal anglais...)...même George Lucas à su se remettre en question après La Menace Fantôme, et s'est payé les services d'un co-scénariste pour L'attaque des clones!

Cependant, je n'ai pas passé deux heures désagréables. J'étais dans une salle pleine de monde (150 personnes), un public averti, conscient du massacre, mais venu par fidélité a l'une ou l'autre franchise...entre connaisseurs, on a bien rigolé, tellement c'était mauvais....

1.11.04

Le "Troie" français...

Arsène Lupin, de Jean-Paul Salomé.
Alors oui, un soir que je m'emmerdais un peu, je suis allé voir Arsène Lupin à Convention, non sans avoir convaincu mon frère de venir au cinoche avec moi, pour aller un autre film qui passait ce soir-là: Eternal Sunshine of the Spotless Mind.
Arsène Lupin, donc. La meilleur façon de le décrire, c'est de le considérer comme le Troie français de l'année. Je m'explique: à l'image de Troie , on a affaire à un film ambitieux mais frustrant, réalisé sans génie, et surtout énervant quand on connait un peu l'oeuvre originale dont il est l'adaptation. Enfin, j'ai trouvé dans ce film des résonances, des éléments de ressemblance avec d'autres blockbusters français de ces dernières, et elles ne sont pas flatteuses.
Arsène Lupin est un film énervant: la réalisation est dynamique (c'est bien) mais trop maladroite pour être efficace (c'est pas bien), voire même carrément déroutante par moments, avec quelques raccords hasardeux (là, c'est grave). Les dialogues sont vraiment mauvais : on se croirait dans un téléfilm de M6. La mauvaise qualité des dialogues nuit grandement au travail des acteurs, en particulier Pascal Greggory, qui est complêtement caricatural, au point que ça devient pénible. Bizarrement, le seul à tirer son épingle du jeu, c'est celui dont la crédibilité était contestable : Romain Duris est vraiment formidable dans ce rôle, et l'idée de lui confier le rôle de Lupin s'avère être le seul pari gagné de ce film. Sa jeunesse et son attitude transforment le personnage, et le bourgeois devient bohême.
Bref, beaucoup d'éléments auraient mérité un meilleur traitement: réalisation, montage, scénario, direction d'acteurs...
Venons-en au second problème: ce film s'inspire, officiellement, de "La Comtesse de Cagliostro" (que je n'ai pas lu). Moi, j'y ai plutôt reconnu des allusions énormes aux "Lupin" que j'ai lu, notamment "Le Bouchon de Cristal" ou "L'aiguille creuse". Le problème, c'est que Salomé emprunte tout un tas d'éléments de la mythologie du personnage pour les mettre dans un seul film, réduisant de ce fait leur signification à de l'accessoire. Exemple: Lupin retrouve un indice sur le lieu ou se trouve le trésor qu'il recherche dans oeil de verre, oeil de verre qui est au centre de toute l'intrigue du "Bouchon de cristal"! C'est nul de transformer un élément fondamental d'un récit pour en faire un accessoire de passage dans un autre! A trop vouloir bourrer son film de références à l'univers crée par Maurice Leblanc, Salomé provoque une indisgestion chez les amateurs des romans. D'autres, notamment Sam Raimi pour Spider-Man, on fait la même chose, mais avec cent fois plus de finesse. On sent que le réalisateur (et scénariste) avait plein de choses à dire, et on en fait les frais: même si on ne s'ennuie pas une seule seconde, force est de constater que le film est vraiment trop long...
Enfin, il faut que je dise un mot sur les ressemblances avec d'autres blockbusters français, sortis il y a un certain temps déjà. On pouvait supposer que le réalisateur à vu ces films, et ne répéterait pas les mêmes erreurs. Eh ben si.
Arsène Lupin m'a fait penser au Pacte des Loups (un film assez bancal, que j'aime pour ses défauts autant que ses qualités) et à Vidocq (brrrr....quand un film me fait penser à Vidocq c'est pas bon signe!). On voit dans Lupin un procédé similaire à celui du Pacte: le réalisateur tente de justifier l'insertion de combats d'arts martiaux dans son film de façon risible: ici, c'est le jeune Lupin (qui ressemble étrangement à un jeune Thierry Lermitte) qui apprend la savate grace à son père. Sauf que quand Lupin adulte se bat, c'est devenu une sorte de kung-fu un peu ridicule et sans grand intêrét. Et comme en plus ce n'est pas très bien réalisé...Pour ce qui est de la ressemblance avec Vidocq, elle s'exprime de plusieurs façons dans la scène de la mort du père de Lupin, une sorte de combat de kungfusavate au sommet d'une falaise. Les deux ennemis sont habillés comme l'Alchimiste, et font des feintes avec leurs capes, etc...Là, déjà, on a peur. Quand vient, vers les 3/4 du film, l'explication de cette scène (qu'Arsène voit à chaque fois qu'il fait des cauchemars), on a droit à un montage tape-à-l'oeil et complêtement loufoque, qui illustre un retournement HENAURME, exactement comme celui qu'on a à la fin de Vidocq. Dans Vidocq, cette révélation "surprise" avait pour effet d'enterrer définitivement un film qu'on avait du mal à apprécier. Dans Lupin, la révélation est caricaturale et ne semble avoir aucun effet sur les personnages. Au final, elle n'à pas d'influence sur le reste du film...C'est con de ne pas assumer son propre scénario! A la rigueur, ils auraient pu tourner ça en dérision, faire une petite allusion à Star Wars, puis voilà! Bref, Arsène Lupin semble reprendre en moins bien les ficelles d'autres blockbusters. Le problème, c'est que ces ficelles étaient déjà affreuses: pourquoi ne pas avoir appris la leçon?

Ce qui est vraiment frustrant dans Arsène Lupin, c'est le sentiment qu'on a d'être passé à côté d'un grand film.


Enfin, la grande sortie de la rentrée...

Un long dimanche de fiançailles, de Jean-Pierre Jeunet
Ca y est, le dernier Jeunet est sorti! Alors, qu'en penser? Voici une pseudo-interview que j'ai accordé au magazine du BDA de Sciences Po, Art Maniak, qui voulait que je décrive le film à partir des 5 sens, plus un 6ème sens dont je faisais ce que je voulais...Excusez donc le côté baclé de l'affaire, je vous le restitue tel quel parce que j'étais assez satisfait de mes réponses...

La vue: pas de doute, on a bien affaire à un film de Jean-Pierre Jeunet: la photo est superbe, les couleurs extraordinaires. C'est comme regarder une carte postale élégamment jaunie par le temps...

L'ouïe: comment ne pas éprouver du plaisir en écoutant la superbe B.O. composée par Angelo Badalamenti? Le thême récurrent du film, à la fois grave et optimiste, vous transporte et vous berce tout au long du film...Entre les envolées lyriques du compositeur de Lynch, on revient à la réalité assourdissante de la guerre des tranchées, le sifflement des obus, les cris de douleur...

Le toucher: tout au long du film mes mains sont humides d'avoir essuyer les minuscules larmes qui se forment sur mes yeux. On ne peut s'empêcher d'en verser une ou deux, surtout vers la fin.

L'odorat: on a envie de se plonger totalement dans le film, de sentir les odeurs des objets que la caméra filme de façon affectueuse, attendrie...au lieu de ça, on ne réussit qu'à sentir l'odeur froide et impersonnelle de la climatisation de la salle, qui diminue l'odeur du parfum de la dame à coté de moi (qui en a mis beaucoup trop). Grace à ça, je n'étouffe pas, mais je suis fatigué par ses commentaires idiots.

Le goût: ce film réveille en moi des souvenirs de goûts passés, et l'eau me vient à la bouche quand on offre a Manech une tartine de beurre au miel, avec un bon bol "de Cacao du Niger". On partage son bonheur lorsqu'il dévore le seul rayon de soleil qu'il a trouvé dans les tranchées...

6e sens, le sens du cinéphile! Alors, qu'a ressenti le cinéphile en moi en voyant ce film? Malgré ce qu'en disent les critiques, j'ai trouvé que l'émotion était au rendez-vous, malgré un esthétisme si méticuleux qu'il peut rendre le film froid et lisse comme du papier glacé, et malgré les manniérismes "jeunétiens" qui m'ont gêné car ils n'avaient pas forcément leur place dans ce type de récit...Cette histoire m'a ému et je suis rentré dedans complêtement, à tel point que j'ai été totalement surpris par la fin! Un film qui réussit à éliminer le cynisme du cinéphile, c'est très fort!