1.11.04

Le "Troie" français...

Arsène Lupin, de Jean-Paul Salomé.
Alors oui, un soir que je m'emmerdais un peu, je suis allé voir Arsène Lupin à Convention, non sans avoir convaincu mon frère de venir au cinoche avec moi, pour aller un autre film qui passait ce soir-là: Eternal Sunshine of the Spotless Mind.
Arsène Lupin, donc. La meilleur façon de le décrire, c'est de le considérer comme le Troie français de l'année. Je m'explique: à l'image de Troie , on a affaire à un film ambitieux mais frustrant, réalisé sans génie, et surtout énervant quand on connait un peu l'oeuvre originale dont il est l'adaptation. Enfin, j'ai trouvé dans ce film des résonances, des éléments de ressemblance avec d'autres blockbusters français de ces dernières, et elles ne sont pas flatteuses.
Arsène Lupin est un film énervant: la réalisation est dynamique (c'est bien) mais trop maladroite pour être efficace (c'est pas bien), voire même carrément déroutante par moments, avec quelques raccords hasardeux (là, c'est grave). Les dialogues sont vraiment mauvais : on se croirait dans un téléfilm de M6. La mauvaise qualité des dialogues nuit grandement au travail des acteurs, en particulier Pascal Greggory, qui est complêtement caricatural, au point que ça devient pénible. Bizarrement, le seul à tirer son épingle du jeu, c'est celui dont la crédibilité était contestable : Romain Duris est vraiment formidable dans ce rôle, et l'idée de lui confier le rôle de Lupin s'avère être le seul pari gagné de ce film. Sa jeunesse et son attitude transforment le personnage, et le bourgeois devient bohême.
Bref, beaucoup d'éléments auraient mérité un meilleur traitement: réalisation, montage, scénario, direction d'acteurs...
Venons-en au second problème: ce film s'inspire, officiellement, de "La Comtesse de Cagliostro" (que je n'ai pas lu). Moi, j'y ai plutôt reconnu des allusions énormes aux "Lupin" que j'ai lu, notamment "Le Bouchon de Cristal" ou "L'aiguille creuse". Le problème, c'est que Salomé emprunte tout un tas d'éléments de la mythologie du personnage pour les mettre dans un seul film, réduisant de ce fait leur signification à de l'accessoire. Exemple: Lupin retrouve un indice sur le lieu ou se trouve le trésor qu'il recherche dans oeil de verre, oeil de verre qui est au centre de toute l'intrigue du "Bouchon de cristal"! C'est nul de transformer un élément fondamental d'un récit pour en faire un accessoire de passage dans un autre! A trop vouloir bourrer son film de références à l'univers crée par Maurice Leblanc, Salomé provoque une indisgestion chez les amateurs des romans. D'autres, notamment Sam Raimi pour Spider-Man, on fait la même chose, mais avec cent fois plus de finesse. On sent que le réalisateur (et scénariste) avait plein de choses à dire, et on en fait les frais: même si on ne s'ennuie pas une seule seconde, force est de constater que le film est vraiment trop long...
Enfin, il faut que je dise un mot sur les ressemblances avec d'autres blockbusters français, sortis il y a un certain temps déjà. On pouvait supposer que le réalisateur à vu ces films, et ne répéterait pas les mêmes erreurs. Eh ben si.
Arsène Lupin m'a fait penser au Pacte des Loups (un film assez bancal, que j'aime pour ses défauts autant que ses qualités) et à Vidocq (brrrr....quand un film me fait penser à Vidocq c'est pas bon signe!). On voit dans Lupin un procédé similaire à celui du Pacte: le réalisateur tente de justifier l'insertion de combats d'arts martiaux dans son film de façon risible: ici, c'est le jeune Lupin (qui ressemble étrangement à un jeune Thierry Lermitte) qui apprend la savate grace à son père. Sauf que quand Lupin adulte se bat, c'est devenu une sorte de kung-fu un peu ridicule et sans grand intêrét. Et comme en plus ce n'est pas très bien réalisé...Pour ce qui est de la ressemblance avec Vidocq, elle s'exprime de plusieurs façons dans la scène de la mort du père de Lupin, une sorte de combat de kungfusavate au sommet d'une falaise. Les deux ennemis sont habillés comme l'Alchimiste, et font des feintes avec leurs capes, etc...Là, déjà, on a peur. Quand vient, vers les 3/4 du film, l'explication de cette scène (qu'Arsène voit à chaque fois qu'il fait des cauchemars), on a droit à un montage tape-à-l'oeil et complêtement loufoque, qui illustre un retournement HENAURME, exactement comme celui qu'on a à la fin de Vidocq. Dans Vidocq, cette révélation "surprise" avait pour effet d'enterrer définitivement un film qu'on avait du mal à apprécier. Dans Lupin, la révélation est caricaturale et ne semble avoir aucun effet sur les personnages. Au final, elle n'à pas d'influence sur le reste du film...C'est con de ne pas assumer son propre scénario! A la rigueur, ils auraient pu tourner ça en dérision, faire une petite allusion à Star Wars, puis voilà! Bref, Arsène Lupin semble reprendre en moins bien les ficelles d'autres blockbusters. Le problème, c'est que ces ficelles étaient déjà affreuses: pourquoi ne pas avoir appris la leçon?

Ce qui est vraiment frustrant dans Arsène Lupin, c'est le sentiment qu'on a d'être passé à côté d'un grand film.


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