10.9.04

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C'est les vacances, malgré le boulot j'ai le temps de continuer à bouffer de la culture en très grosses quantités:

5x2, de François Ozon : une énorme déception. Comme pour Swimming Pool, l'affiche (je trouve la photo de Freiss et Bruni-Tesdeschi très belle, et très poétique) et la bande-annonce me donnaient très envie d'y aller, et je sors du cinéma avec le sentiment d'avoir perdu mon temps. La poésie et la grâce de l'affiche sont absentes du film. Je ne comprends pas comment on peut encenser à ce point un film qui n'a aucun intérêt, autant du point de vue de la mise en scène, inexistante ou franchement lourde (une échelle coupe en deux un couple dont on sait déjà qu'il va se séparer!), que du point de vue du scénario, lui aussi très lourd et sans surprises: le film étant décomposé en 5 parties, on a l'impression qu'a aucun moment Ozon trouve le temps de développer un peu son récit. De ce fait, tout est précipité, tout est baclé, les dialogues et les situations sont caricaturales. Le message du film : la fidelité est impossible, n'essayons pas de nous y tenir, de toute façon c impossible. Alors autant faire comme les homos et accepter sans ciller toutes les infidelités. Après tout, c bien connu, les homos sont bcp plus heureux et équilibrés que nous, les hétéros!
La structure à la Irréversible n'apporte rien, c un gimmick qui est sans intérêt puisqu'on connaît la fin dès le début et que chaque minute du film vient apporter la preuve que cela ne pouvait finir que comme ça et pas autrement: le mari est un grand absent, un salaud qui ne sait pas ce qu'il veut, et la femme se laisse toujours marcher sur les pieds. Ce qui m'avait plu dans Irréversible, un film qui à autant de défauts que de qualités, c'est qu'a travers la structure du film, on en oubliait la fin sordide et horrible, pour être noyé dans le bonheur et la poésie des dernières scènes. Même James Cameron, un Américain décidemment pas subtil, parvient dans Titanic à nous faire oublier qu'un iceberg va tout foutre en l'air! 5X2 ne réussit rien de tout ça, et c pas un pauvre plan sur un coucher de soleil à la fin qui va rajouter un peu de poésie à un film grossier.

Mensonges, trahisons, et plus si affinités... : une belle surprise. Une comédie française rythmée, bien écrite, dont la mise en scène est très dynamique. On rit bcp et souvent, ce qui est essentiel pour toute comédie qui se respecte! Certains trouveront la fin un peu convenue et cucul, moi je l'ai trouvé plutôt émouvante, et surtout, joué sur un ton juste, sans surenchère.
Le film se distingue par la qualité de son interprétation : Edouard Baer nous offre (enfin) un personnage nuancé, qui commence comme n'importe quel personnage de trentenaire indécis, beau parleur et désinvolte ("à la Edouard Baer" quoi) pour se transformer au fil du récit en mec lucide et bourré de contradictions, capable de forcer la main aux autres sans se prendre en main lui-même...un personnage "juste", quoi. Les autres acteurs sont aussi formidables: on retiendra le charme incroyable de Marie-Josée Croze, la beauferie sans complexe de Clovis Cornillac, et la froideur implacable d'Alice Taglioni....
En fait, si ce film me plaît, c avant parce qu'il n'est pas frappé par ce mal qui pourrit le cinéma français depuis trop longtemps : ce film a un début et une fin, et il se passe quelquechose entre les deux. Marre de toutes ces "tranches de vie" ou rien ne bouge, ou les dialogues sont bons mais où rien ne se passe. Mensonges... est l'antithèse du très décevant Ils se marrièrent et eurent beaucoup d'enfants.

Vu en DVD:
Training Day : un polar percutant. Denzel Washington est très impressionant dans ce rôle de flic pourri, qui parvient à maintenir pendant longtemps l'ambiguïté sur ses motifs réels: jusque dans les dernières minutes du film, on ne sait pas quoi en penser : vrai bon flic aux méthodes plus que douteuses, ou vrai pourri qui abuse de son autorité pour remplir son portefeuille? Denzel Washington nous rappelle la composition de Johnny Depp dans Pirates des Caraïbes, en plus méchant et plus violent surtout ;) Dans le registre de "l'acteur-gentil-qui-casse-son-image-en-prenant-un-role-de-méchant", Washington s'en sort beaucoup mieux que Tom Hanks, faux méchant dans Road To Perdition.
Les dialogues sont percutants, et très divertissants, même s'ils ne sont pas toujours faciles à suivre! Il suffit d'entendre Denzel apostropher le pauvre Ethan Hawke avec des "My nigga!" tonitruants, pour être conquis par l'énergie de ce film. La mise en scène est superbe, et va jusqu'a nous offrir quelques purs "moments de grâce" cinématographiques. L'image est superbe, alternant les couleurs et les atmosphères au gré des épisodes.
C'est en voyant ce film que l'on comprend pourquoi Antoine Fuqua est courtisé par Hollywood, même s'il n'a pas toujours tenu ses promesses, cf l'effroyable Tears of the Sun, et l'inégal mais honnête King Arthur.
Il faut voir Training Day, "le meilleur polar de l'année 2002" selon Première, un polar que bcp (dont moi) avaient ignoré après l'Oscar de Denzel en 2002, sous prétexte que l'Oscar récompensait sa carrière et non ce film en particulier, qui ne pouvait pas être de grande qualité. C'était une erreur, et je suis content de m'en être enfin rendu compte!

Sinon, au rayon Littérature, je viens de finir le superbe Globalia, de Jean-Christophe Rufin (Goncourt 2001 pour Rouge Brésil). C'est un bouquin incroyable, un récit "d'anticipation" au sens noble du terme, un roman de SF qui nous propose de jeter un coup d'oeil à l'avenir de nos sociétés occidentales et à leurs limites. Globalia, c'est les tendances d'aujourd'hui poussées à leur paroxysme, c'est un beau roman d'aventures qui nous offre, le temps d'un paragraphe, au gré d'une phrase ça et là, des réflexions très pertinentes sur le monde dans lequel nous vivons et sur celui dans lequel nous pourrions vivre...Un monde dans lequel la menace terroriste, qu'elle soit réelle ou fictive, permet aux autorités de justifier n'importe quelle décision drastique, un monde heureux et fier de sa diversité, ou chacun à la droit de cultiver ses différences culturelles et ethniques, mais où le moindre écart par rapport à la pensée dominante est immédiatement condamnée par la société tout entière...Un monde fictif, certes, mais pas très éloigné de nous. Le monde que décrit Rufin, c'est l'Amérique!

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